Si le terme « New Work », apparu dans les années 70, revient aujourd’hui en force, c’est bien parce que le rapport au travail des salariés a profondément changé ces dix dernières années. Un état de fait qui a donc commencé bien avant la crise sanitaire et qui oblige les professionnels des ressources humaines à s’adapter à ce nouveau paradigme.
Toutes les études parues ces derniers mois* arrivent aux mêmes conclusions : les employés apprécient leur travail. En Suisse romande, ils sont 87 % à le plébisciter, en particulier ceux qui sont dans une TPE ou indépendants. Plus la taille de l’entreprise augmente, moins la satisfaction est forte. Cependant, derrière ce satisfecit général, la place du travail continue à être moins centrale dans notre vie. Une tendance mondiale que les études observent en Europe, aux Etats-Unis et, plus étonnant, en Chine. Révolu donc, le slogan : « travailler plus pour gagner plus ». Ainsi, en France, en 2008, 68 % des travailleurs affirmaient préférer gagner plus d’argent au détriment du temps libre. Ces proportions sont totalement inversées aujourd’hui puisque 61 % préfèrent bénéficier de plus de temps libre et être moins rémunérés. Le travail est de moins en moins vécu comme un facteur d’intégration sociale ou le vecteur principal d’épanouissement..
Même si le rapport temps/argent a évolué, il faut tout de même nuancer les conclusions. En effet, la rémunération reste le premier critère pour les salariés dans le choix d’une entreprise. Mais le salaire ne suffit pas à satisfaire les travailleurs. La reconnaissance constitue le principal levier de motivation. 60 % des Romands ne se sentiraient pas assez valorisés et ce déficit est particulièrement ressenti par les jeunes. Les trois quart des employés se sentiraient stressés au travail ce qui aurait un impact direct sur l’absentéisme. Paradoxalement, il n’y a pas forcément de corrélation entre la durée du travail et le sentiment que la charge est excessive. Pour preuve, les indépendants qui travaillent plus que la moyenne sont globalement plus satisfaits que les autres travailleurs. Derrière ce constat, apparait une critique du management. 33 % des Romands ne jugent pas leur management comme bienveillant. D’autres études montrent que les salariés estiment en faire plus que leur salaire et qu’ils ne sont pas reconnus par leurs managers. Plusieurs rapports démontrent clairement que le stress a trois causes principales : les difficultés relationnelles avec le management, la charge psychique et le faible degré d’autonomie.
La généralisation du télétravail avec la crise sanitaire a amené une véritable rupture. Malgré une grande disparité entre les entreprises qui ne veulent ou ne peuvent instaurer le télétravail et celles qui l’ont intégré à raison de 2 à 3 jours hebdomadaires en moyenne, le travail à domicile est considéré pour 60 % des Romands comme le moyen de mieux équilibrer vie professionnelle et vie personnelle. Les jeunes générations sont particulièrement exigeantes sur les conditions de leur emploi, notamment concernant leur autonomie dans la manière d’organiser leur travail. Les recruteurs le vivent au quotidien : difficile d’attirer la génération Z sans la contrepartie d’une certaine flexibilité.
Certains secteurs professionnels tels que l’hôtellerie et la restauration ont connu des vagues de démission postpandémiques. Néanmoins, les études récentes tendent à prouver que si une courte majorité de salariés songent à démissionner, peu sautent le pas. Certes, cette envie de démission augmente mais il existe un décalage entre les souhaits exprimés et la réalité. Quitter une entreprise reste considéré comme un risque pour beaucoup. Le marché de l’emploi favorable pour les salariés expliquerait ce phénomène de grande démission… « qui n’en est pas un », auquel s’ajoute une situation de rattrapage post-Covid. Il semble plus juste de parler de souhait de mobilité professionnelle dans son entreprise ou dans une autre, ou de reconversion. 25 % des Romands seraient en réflexion.
Les études montrent des différences générationnelles qui préfigurent les évolutions à venir dans le monde professionnel. Les 18-24 ans auraient une vision plus utilitariste du travail que les seniors pour lesquels le travail reste le moyen de trouver leur place dans la société. Le travail n’a plus de dimension statutaire et identitaire. Il est l’un des moyens contribuant à leur épanouissement mais plus le seul. Les jeunes envisagent massivement la mobilité dans l’entreprise, notamment par l’acquisition de nouvelles compétences. Ils sont à la recherche d’un métier qui a du sens, porteur de valeurs et favorisant leur épanouissement. On se souvient des récents plaidoyers d’étudiants de grandes écoles françaises exprimant leur volonté de mettre leurs compétences au service de la société, en rupture avec le modèle de leurs ainés. Une prise de parole qui rejoint la théorie des « bullshit jobs » de l’anthropologue américain David Graeber qui soulignait, dès 2013, qu’un nombre croissant de travailleurs estimaient que leur travail était inutile voire qu’il desservait la collectivité.
* Sources :
Fin 2022, le Groupe Diot-Siaci, notre maison mère, publiait avec l’Ifop une enquête sur les mutations des perceptions du travail. Mickaël Berrebi, Responsable du Diot-Siaci Institute, revient sur les points à retenir.
La première concerne la vision des salariés dans leur rapport au travail. Si jusqu’à présent, ce dernier était souvent perçu comme une façon de trouver sa place dans la société, ce n’est plus le cas aujourd’hui. Dorénavant, 41% des salariés estiment que le travail a d’abord une fonction utilitariste et l’associent à une contrainte pour gagner de l’argent. Cette nouvelle vision du travail est particulièrement présente chez les plus jeunes ou les ouvriers. La deuxième rupture, c’est l’envie de mobilité. 60% formulent ce souhait. Parmi eux, on retrouve les plus jeunes et les personnes ayant une ancienneté inférieure à 10 ans au sein de leur entreprise et les salariés de certains secteurs comme le bâtiment, l’agriculture ou l’industrie. La dernière rupture concerne enfin les aspirations des salariés. La majorité aspire à un meilleur équilibre entre leur vie privée et professionnelle.
Les trois quarts des salariés interrogés s’estiment heureux au travail, une statistique assez stable depuis plusieurs années. On note également leur fort niveau d’engagement puisque 77% d’entre eux indiquent en faire généralement plus que ce qui est attendu. Toutefois, on observe aussi que plus de la moitié des salariés pensent à la démission, et pour 51% d’entre eux, cette envie se révèle plus forte qu’il y a un an. Pour autant, l’action de démissionner reste encore assimilée à une prise de risque élevée. Avec des salariés majoritairement heureux et engagés au travail qui, en plus, perçoivent la démission comme un risque, on ne peut véritablement parler de « grande démission ».
Si l’on ajoute à ces mutations, les difficultés actuelles de recrutement rencontrées par l’ensemble des entreprises et la forte accélération inflationniste, les services RH sont évidemment impactés. D’autant plus que l’enquête nous rappelle à quel point la rémunération joue un rôle important aux yeux des salariés. Toutefois, quelques leviers semblent efficaces pour contrebalancer une rémunération qui ne serait pas à la hauteur escomptée, notamment lorsqu’un salarié ressent une bonne ambiance au travail et que l’emplacement géographique est adapté à son domicile.
Ce dossier est paru dans Insurance Inside n°29 - mars 2023.
Mickaël Berrebi, Responsable du Diot-Siaci Institute
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