Inondations dans le canton de Vaud, vents violents dans les montagnes neuchâteloises, déluge de grêle sur la campagne valaisanne, record de chaleur sur tout le territoire… si la Suisse ne fait pas partie des pays les plus exposés au changement climatique, elle n’en est pas exempte non plus. Notre pays connait des épisodes extrêmes de plus en plus violents et fréquents au point que la question de la capacité d’assurance pour les dommages naturels soit désormais un sujet préoccupant.
Le système suisse de couverture des risques naturels est reconnu pour son efficacité et repose sur un modèle de solidarité bien ancré. Il se distingue par un système dual : dans 19 cantons, les bâtiments sont couverts par des assurances immobilières cantonales, tandis que dans les 7 autres cantons, ce sont des assurances privées qui prennent en charge cette couverture.
L'assurance des risques naturels en Suisse est généralisée, rendant l'assurance obligatoire pour la majorité des bâtiments, ce qui permet à un maximum de personnes de bénéficier de cette protection à un coût abordable. Les primes d'assurance sont uniformes, indépendamment du niveau de risque auquel un bâtiment est exposé, grâce à un principe de solidarité qui est essentiel au système.
Cette solidarité s’exprime aussi entre les assurances privées avec le pool pour les dommages naturels. Il permet de mutualiser les risques entre les compagnies d'assurances privées, répartissant ainsi équitablement les charges financières liées aux sinistres. Ce modèle hybride, combinant l'action de l'État et des assureurs privés, a fait ses preuves et est souvent cité comme une référence internationale pour la gestion des risques naturels.
Néanmoins, la forte augmentation de la fréquence et de l’intensité des événements climatiques au niveau mondial entraîne fatalement des répercussions sur la capacité d’assurance c’est-à-dire sur les montants que les compagnies d’assurance seront prêtes à couvrir en cas de sinistres.
Si, pour le moment, les dommages causés par des catastrophes naturelles en Suisse restent assurables et ce, à des prix relativement raisonnables, les conditions du marché de la réassurance se durcissent sur le plan international. En clair, les réassureurs ont tendance à augmenter leurs prix et à réduire leurs couvertures amenant les assureurs à ajuster leur offre en conséquence. Les nouvelles modélisations des risques qui tiennent compte de l’accélération des sinistres, vont dans le même sens et justifient un durcissement des conditions d’assurance pour protéger les réserves des compagnies. Cela se traduit par une hausse des primes même si pour le moment elles restent maitrisées.
C’est le cas notamment de l’assurance Choses et perte d’exploitation. En effet, à contre-courant de la réalité, la FINMA a proposé, avec effet au 1er janvier 2023, une diminution du taux de prime de l’assurance Choses pour tous les assureurs. Conséquence de cette décision politique : les assureurs procèdent en 2024 pour les primes 2025 à des CAP (clause d'adaptation de primes) sur les couvertures dégâts d'eau et vol, afin de compenser la baisse des taux. Ne s'agissant pas d'assainissements, ces CAP touchent la plupart des contrats Choses indépendamment de leurs rendements. Finalement, le client ne bénéficie peu ou pas de cette baisse de prime.
Autre conséquence pour les clients : des exclusions et des limitations plus nombreuses. Les polices d'assurance pourraient inclure davantage d'exclusions ou des plafonds plus bas pour les couvertures liées aux dommages naturels.
Enfin, dans certains cas extrêmes, les clients ne trouveraient plus aucune assurance acceptant de porter le risque, en particulier pour les zones jugées à haut risque.
Pour faire face à ces défis, plusieurs stratégies peuvent être envisagées.
Investir dans des mesures de prévention et de protection représente désormais une priorité pour contrer le dérèglement climatique et réduire l'impact des catastrophes naturelles. Ainsi, face au risque d’inondations, le lancement de travaux telle la construction d’ouvrages pour contenir et guider l’eau des lacs et des cours d’eau apparait comme une des solutions pour limiter les dégâts. C’est l’un des multiples exemples d’actions mises en place. Selon les chiffres de l’OFS, en 2021, la Suisse a investi 606 millions de francs dans la protection contre les dangers naturels, dont près de 290 millions affectés à la protection contre les inondations. Et les efforts ne portent pas uniquement sur les zones rurales. De nombreuses villes intègrent des zones vertes au sein des quartiers urbains pour absorber le surplus d’eau en cas de fortes précipitations et baisser la température en période de canicule. La recherche agronomique, technologique, … est mobilisée et bénéficie de financements privés et publics. Citons par exemple le projet « Grandes cultures résilientes au changement climatique 2035 » qui travaille sur de nouvelles méthodes d’irrigation, des variétés résistantes ou une gestion durable des sols.
Développer de nouvelles formules d'assurance qui tiennent compte de la nouvelle réalité des risques naturels constitue un autre axe actuellement envisagé. L’assurance paramétrique ou indicielle peut constituer une solution intéressante (cf. encadré).
Autre exemple : pour déléguer certains risques, les réassureurs émettent de nouveaux titres, les cat bonds. Ce sont des produits financiers destinés à assurer une couverture en cas de risques liés à des catastrophes naturelles. Ils sont un complément à la réassurance classique.
Enfin, les gouvernements peuvent jouer un rôle en fournissant des garanties ou en créant des fonds d'indemnisation spécifiques. En Europe, la situation dépend des pays. La France a, par exemple, une assurance publique obligatoire couvrant les catastrophes naturelles. La Confédération suisse prévoit d'introduire une prime sécheresse et gel en 2025, destinée à compenser les pertes financières des agriculteurs dues aux épisodes de gel et de sécheresse de plus en plus fréquents.
« En 2023, en Suisse, les dommages assurés dus à des catastrophes naturelles sont estimés à 306 millions de francs en moyenne annuelle. Les dégâts liés aux catastrophes naturelles dans le monde sont estimés à 280 milliards de dollars, dont 108 milliards sont couverts par des assurances. »
« En 2023, en Suisse, les dommages assurés dus à des catastrophes naturelles sont estimés à 306 millions de francs en moyenne annuelle.
Les dégâts liés aux catastrophes naturelles dans le monde sont estimés à 280 milliards de dollars, dont 108 milliards sont couverts par des assurances. »
Source : SwissRe
L'assurance paramétrique ou indicielle est un type d'assurance innovant qui diffère des assurances traditionnelles en ne basant pas l'indemnisation sur les pertes réelles subies, mais sur des indices ou des paramètres prédéfinis, tels que l'intensité d'un événement naturel (comme la magnitude d'un tremblement de terre ou le niveau de précipitations). Elle constitue une alternative intéressante lorsque l’assurance traditionnelle est difficile à obtenir ou très couteuse.
Fonctionnement
Lors de la souscription d'une assurance paramétrique, l'assuré et l'assureur conviennent de certains paramètres déclencheurs. Par exemple, pour un contrat couvrant un parc éolien, la garantie pourrait dépendre de la force du vent. Dès que l'événement déclencheur est confirmé par une source indépendante (comme un institut météorologique ou sismologique), l'indemnisation est versée sans qu'il soit nécessaire de prouver les dommages subis.
Le mécanisme de déclenchement est simple et transparent, car il repose sur des données objectives et indépendantes. Les coûts administratifs et les délais souvent associés à l'évaluation des sinistres dans les assurances traditionnelles s’en trouvent sensiblement réduits. Néanmoins, son efficacité repose sur l’accès à des données précises et fiables, souvent assez complexes.
L'assurance paramétrique est en pleine expansion, notamment dans les régions du monde où les risques climatiques et naturels sont élevés. En Suisse, elle représente une option complémentaire intéressante pour les entreprises et les institutions souhaitant se protéger contre des risques spécifiques.
Ce dossier est paru dans Insurance Inside n°35 - septembre 2024.
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